Nouvelles de Flandre
Quid de la mission des experts de la CIPE chargés de définir la notion de "minorité nationale"?

Quinze ans après avoir signé la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales, la Belgique ne l'a toujours pas ratifiée. Raison invoquée: il n'y a pas d'accord sur la notion de "minorité nationale".

A la lecture des actes du colloque international "Les minorités, un défi pour les Etats", organisé par l'Académie royale de Belgique en 2011 à Bruxelles, on peut se demander pourquoi notre pays se limite à l'avis des experts de la Conférence interministérielle de politique étrangère (CIPE) pour définir le concept de minorité. Pourquoi ne pas suivre l'avis de la Commission de Venise qui a déterminé les minorités à protéger en Belgique? Pourquoi ne pas appliquer le principe d'auto-identification préconisé par l'ONU? Le dernier mot reviendra de toute manière au Comité consultatif du Conseil de l'Europe chargé d'évaluer la mise en œuvre de la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales.

Voici ce que disait déjà en 2011 Jan Velaers, professeur de droit constitutionnel à l'Université d'Anvers et expert flamand: "Ce qui est important - surtout pour la Belgique -, c'est que le Comité consultatif estime que non seulement les minorités au niveau national, mais aussi les minorités au niveau régional peuvent être des "minorités nationales" au sens de la Convention-cadre. En effet, il n'est pas très pertinent de savoir qu'un groupe de la population représente une majorité au niveau de l'État, alors que ce n'est pas l'État, mais l'entité fédérée qui est compétente en matière de langue, culture et enseignement, par exemple.

Ainsi, le Comité consultatif a reconnu qu'en Suisse, les germanophones formaient une minorité dans les cantons de Fribourg et du Valais et que les francophones étaient une minorité dans le canton de Berne. (...)

Le Comité consultatif se montre, enfin, très pragmatique envers les déclarations nationales. Il admet qu'à défaut de définition, il est laissé aux États une certaine marge d'appréciation, mais cette marge n'est pas illimitée. Le Comité examine si l'État n'a pas désigné les minorités de manière irresponsable et arbitraire. Il n'hésite pas à proposer d'autres groupes que ceux que les États ont qualifié de 'minorités nationales'.

Mon collègue Jean-Claude Scholsem a un jour fait un plaidoyer machiavélique en faveur de la signature de la Convention-cadre, affirmant que seuls les germanophones étaient une minorité. Le Comité consultatif préciserait en un rien de temps qu'il n'est pas d'accord avec ce point de vue.

À la lumière de ces avis, il me semble que quel que soit le discours adopté par le gouvernement belge, il est très probable que le Comité consultatif estime que les germanophones en Belgique, les francophones en Flandre, ainsi que les néerlandophones en Wallonie et à Bruxelles sont des minorités nationales, pourvu que ces groupes aient des liens solides et durables avec la région où ils résident et qu'ils désirent être considérés comme des minorités au sens de la Convention-cadre.

Dans les publications spécialisées, on défend la thèse selon laquelle le gouvernement devrait déclarer à la ratification que seuls les francophones des communes à facilités sont considérés comme une minorité nationale. Il serait douteux que le Comité consultatif accepte une telle restriction".

En tout état de cause et c'est ce qu'il ressort d'une conférence organisée en 2015 par l'Association de promotion des droits humains et des minorités (ADHUM), à laquelle participait Jérôme Sohier, professeur de droit constitutionnel à l'ULB: la responsabilité de l'Etat belge pourrait être engagée du fait de sa carence dans la ratification de la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales.

 

Edgar FONCK


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